Le désir d’indépendance catalan : une quête du bonheur?

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Un article de Marion J. (TSSIA)

 

 

 

    Au cours des dernières décennies, une partie des Catalans s’est sentie oppressée par le gouvernement espagnol, et a souhaité plus de liberté. Au début, cela ne concernait qu’une minorité des Catalans. Mais en 2009, l’impact de la crise économique renforce le nombre de mouvements de manifestation dans le but d’obtenir l’indépendance de la Catalogne vis-à-vis de l’Espagne. Les élus au Parlement catalan de ces dernières années sont d’ailleurs majoritairement indépendantistes.

 

    Cette revendication est liée à des questions politiques et économiques : la Catalogne apporte 18% des richesses de l’Espagne (elle représente que 16% de la population espagnole) et seulement 11% des richesses du pays sont réinvesties en Catalogne. Toutefois, il est aussi question de culture et d’identité. En effet, en Catalogne, le Castillan (langue officielle de l’Espagne) est la langue co-officielle avec le Catalan qui y est donc très parlé à la radio, à la télévision, dans les journaux, et est apprise à l’école. Le Catalan a donc une place importante en Catalogne. De plus, le fait que la région ait sa propre langue renforce l’appartenance qu’un individu peut ressentir pour sa région. Enfin, contrairement à la Catalogne, certaines communautés autonomes, comme le Pays basque et la Navarre, n’ont pas à passer par l’État pour le prélèvement des impôts, ce qui a pu créer une forme de jalousie.

 

    Tous ces éléments suscitent le mécontentement des indépendantistes catalans depuis quelques années mais, ils n’ont jamais été aussi loin dans leurs actes qu’en cette fin d’année 2017 avec, notamment, le référendum de décembre. Nous pouvons associer cela à une sorte de quête dont la victoire serait l’obtention de l’indépendance catalane. Cependant, quel est le réel moteur de ces actions? Cette quête de l’indépendance est-elle une quête du bonheur ?
Le recherche du bonheur peut être associée à la recherche d’un idéal. C’est une satisfaction durable différente pour chacun. Cependant, le bonheur est un concept n’ayant pas de définition universelle ; chacun a sa propre définition du bonheur.
Ainsi, si nous pensons au désir d’indépendance de la Catalogne, plusieurs questions peuvent alors nous venir à l’esprit : est-ce le bonheur que les Catalans recherchent à travers l’indépendance ? Quelle forme de liberté peut-elle leur apporter ?

 

 

 

    En revendiquant leur indépendance, les Catalans affirment leur identité, et il en va de même pour ceux qui s’y opposent. L’identité est importante pour l’homme : comment atteindre le bonheur si nous ne savons pas qui nous sommes ? Chacun à sa propre identité, cette dernière nous sert tous les jours pour nous différencier les uns des autres. D’ailleurs, un individu qui n’a pas d’identité est mal vu par la société, on l’associe à un “mouton suivant le troupeau”, c’est-à-dire que l’individu ne fait que suivre ou imiter les autres et ne montre pas sa propre personnalité, il ne s’exprime pas en s’appuyant sur ce qu’il pense par lui-même. Il devient donc dépendant d’autrui. Ainsi, est-ce en affirmant une identité propre qu’on peut atteindre le bonheur, en se différenciant d’autrui?

 

    Dans le cas des Catalans, nous pouvons dire que se séparer de l’Espagne revient à abandonner une partie de leur identité. En effet, les Catalans sont aussi des Espagnols. Et même s’ils ne se sentent pas tous vraiment Espagnols, ils sont Européens par le lien entre leur pays et l’Union européenne. Cependant, si la Catalogne devient indépendante alors elle devra quitter l’Union européenne, et donc perdre cette part d’identité européenne qui est importante pour beaucoup d’entre eux.
Néanmoins, les Catalans sont beaucoup plus attachés à leur culture régionale qu’à celle de l’Espagne, ce qui pourrait expliquer que les indépendantistes ne ressentent pas l’envie de s’arranger pour rester politiquement et économiquement liés à l’Espagne.
Cette envie d’éloignement avec l’Espagne est renforcée par l’oppression et les tentatives de dissuasion du gouvernement espagnol à l’encontre des actes indépendantistes catalans. Ce conflit crée une division entre les Catalans et les autres régions de l’Espagne qui ne souhaitent pas laisser partir la Catalogne. Cependant, le fait que les autres régions ne veuillent pas que la Catalogne soit indépendante s’explique surtout par le fait que cette dernière est une ressource importante pour l’Espagne, cela peut être vu comme une action motivée par un intérêt.

 

Les différentes régions de l’Espagne, bien que non indépendantes, sont autonomes dans beaucoup de domaines et dans leur développement. Nous pouvons alors nous demander pourquoi les Catalans cherchent-t-ils l’indépendance lorsqu’ils ont déjà l’autonomie ?

 

Définissons tout d’abord le terme “autonomie”. D’après le dictionnaire Larousse, c’est la capacité d’une personne ou d’une organisation à prendre des décisions seule. La racine grec du mot autonomie est la suivante : autos qui signifie “soi-même” et nomos, qui signifie “loi”. Ainsi, être autonome, c’est obéir à sa propre loi, se gouverner soi-même. L’autonomie se réfère au soi. Ensuite, l’indépendance est l’absence factuelle d’attaches à autrui ou à une organisation, et la volonté de n’être soumis à rien, ni influencé par quiconque. La racine du mot est latine : pendere, qui veut dire “pendre”. Ainsi, être indépendant, c’est ne dépendre de rien ni personne. L’indépendance se réfère aux autres. L’autonomie a une connotation “coopérative” : un individu ou une organisation affirme sa liberté sans opposition ni animosité. Au contraire, l’’indépendance a une connotation “vindicative” : un individu ou une organisation affirme sa liberté et lutte pour la conquérir.

En politique, on parle de collectivités autonomes, qui se gèrent seules, tout en étant rattachées à un pouvoir central. On parle d’indépendance pour un territoire souverain (mais en réalité, il est souvent rattaché à une organisation internationale comme l’ONU ou l’UE dans le cas de la France). La Catalogne est actuellement dans le premier cas : c’est une des dix-sept communautés autonomes rattachées au gouvernement espagnol.

Enfin, nous avons dit qu’une partie des Catalans se sentait oppressée par le gouvernement espagnol. En effet, certains ont ce sentiment non seulement à cause des tentatives de dissuasion du gouvernement espagnol à l’encontre des actes indépendantistes, mais aussi lorsqu’il s’agit de gérer et de diriger la Catalogne. Selon certains indépendantistes, le gouvernement est trop présent dans la gestion de la région. Ainsi, l’indépendance les libérerait de ce sentiment d’oppression et pourrait à leurs yeux leur apporter une satisfaction durable. Cependant, tous les Catalans ne sont pas favorables à ces revendications ; certains ne veulent pas du tout de cette indépendance et restent attachés à leur identité espagnole. Alors, peut-on faire le bonheur de tous?